Séminaire : "Les enseignements de Lénine sont vivants".

Socialistes, relevez-vous ?Les conditions de la victoire.

Mohamed Salah Toumi-Maaroufi, 

Avant-propos : « Il serait évidemment fort commode de faire l'histoire si l'on ne devrait engager la lutte qu' « avec des chances qui nous sont infailliblement favorables ».

L'idée de l’égalité était le plus profond et le plus noble motif qui avait animé et qui anime encore les masses humaines, que ce soit consciemment ou inconsciemment depuis l'ère des injustices de classe incarnées par les systèmes de l’esclavagisme et du féodalisme jusqu’aux injustices spécifiques du capitalisme .

les systèmes esclavagistes et féodaux dans leurs diverses formes à travers la planète étaient basées sur le travail de la terre qu’avait permis la sociabilité rurale, étant donné que cette sociabilité, après la découverte de l'agriculture, et le dépassement de l'étape primitive de la cueillette et de la chasse, avait engendré la domestication des divers animaux afin de les utiliser dans cette voie, ainsi que l'asservissement de l'effort humain pour atteindre le même objectif d’où les esclaves et les serfs.

Mais ce sont les mêmes injustices que le capitalisme n’a été qu’une simple extension d'elles, tout en prétendant les dépasser. Le capitalisme - s'appuyant sur les activités commerciales, transformatrices industrielles, usuraires et bancaires que la sociabilité citadine avait développées dans les noyaux villageois d'abord, puis dans les villes (bourgs = bourjs en Arabe), dont les habitants ont été connus dans le lexique européo - centriste sous le nom de la bourgeoisie - ne pouvait s’exercer qu’à travers l’exploitation d’une main d’œuvre salariée (le vol de la plus- value) et la spoliation des richesses des peuples (l’impérialisme) .

Quant au socialisme, surtout dans sa phase méthodique, rendue possible par la découverte du matérialisme historique et du matérialisme dialectique, qui l’a fait rompre avec ses formes antérieures utopiques ou anarchiques, il peut être considéré en relation avec l’idée de l’égalité comme l’expression la plus élevée du désir de l’Humanité de faire progresser la vie sociale vers un stade supérieur dont les conditions objectives ont été réunies grâce à la propagation du mode de production capitaliste , aux régulations économiques qu'il a apportées , à son encadrement social d’un type nouveau , et à sa rénovation culturelle, institutionnelle, et juridique ... Mais il reste nécessaire de sculpter et d'affiner toutes les conditions subjectives nécessaires à l'émergence de cette nouvelle phase de la sociabilité humaine... et c’est la tâche la plus difficile car elle se heurte aux sédiments incarnés chez les uns par la tendance à asservir autrui d’une part, et chez les

autres par la tendance à accepter l'asservissement, ce sont là les résidus des époques de

l'injustice de classe qui se transforment parfois en traditions et coutumes... et l’on sait ici

que les coutumes et les traditions deviennent - en l'absence d’une véritable prise de

conscience - une seconde nature pour les individus.

La philosophie du capitalisme est basée sur la liberté d'initiative de l'individu humain et sur l'encouragement de ses efforts par tout l’arsenal législatif promulgué en sa faveur, et par l'oppression exercée à son profit, afin de lui permettre de réaliser la richesse financière et le butin.

Les résultats le plus dangereux du capitalisme qui en découlent dans ce contexte sont :

- La pollution du milieu naturel

- La provocation des guerres dévastatrices

- Le recours au travail des femmes tout en essayant de préserver au maximum leur statut d’infériorité résultant de l’héritage de la société patriarcale

- Le piétinement de toutes les valeurs intellectuelles et morales

Ce chaos et ces afflictions ne pouvant plus être tolérés pour toujours, c’est ainsi que des forces ont émergé qui militent pour renverser ces méfaits ;

Ces forces sont :

Les mouvements syndicaux et les partis politiques des ouvriers et des paysans, les mouvements anti-impérialistes et de libération nationale, les mouvements de défense de la nature et de l'environnement, les mouvements pour la paix, et les mouvements de libération des femmes. Ces forces sont entièrement liées à la cause socialiste On comprend ici intuitivement que la victoire du socialisme comme contradiction, dans le monde des significations aux ères des injustices de classe, doit être le fruit d’un mouvement qui possède une conscience historique correcte, et avoir des militants qui se distinguent par une véritable générosité révolutionnaire et qui ont une pleine capacité pour travailler en toutes circonstances - mais après étude et enquête - parmi tous les travailleurs, et en général, parmi tous les opprimés et les démunis, sans que les circonstances de la lutte , ou les succès, ni les échecs et les méandres, ne leur font perdre l’essence de leurs buts, ou leur volonté d’éradiquer l'individualisme égoïste et pathologique ainsi que le chauvinisme et le racisme, c’est cette volonté qui doit les pousser constamment à lutter pour diffuser des valeurs coopératives basées sur l'abnégation, l’entraide , et l'amour, entre les membres de la race humaine.

Cette tâche peut sembler simple en apparence, mais elle est extrêmement importante et complexe dans son essence, elle consiste de nos jours à réarmer le mouvement de tous les travailleurs et tous les opprimés des villes et des campagnes avec une prise de conscience sociale, historique et politique juste, et combattre toutes les influences propagées par la puissante propagande capitaliste et impérialiste qui a flouté la vision dans les radars de la pensée socialiste, surtout après l'échec temporaire des expériences menées au cours du XXe siècle, qui ont malheureusement - et non comme on s’y attendait et annonçait - ouvert l’horizon sur le retour du libéralisme sous son nouveau visage (nommé le néolibéralisme)

C’est pour cela que la pensée socialiste, bâtie sur les acquis de la science, a le devoir de toujours abandonner toute interaction d’ordre métaphysique avec ses textes fondateurs sans que cela l'empêche de n’avoir aucune complaisance dans la défense de ces textes tant que les normes de la science prouvent leur validité sous tel ou tel aspect, et tant que l’expérience sur le terrain indique leur efficacité et efficience.

Vladimir Ilitch Lénine a dit dans ce contexte :

"Nous ne considérons pas la théorie de Karl Marx comme complète et intouchable. Au contraire, nous sommes convaincus qu'elle n'a fait que poser la pierre angulaire d'une science que les socialistes doivent développer dans toutes les directions s'ils veulent suivre le rythme de la vie. Cette théorie ne présente que des principes directeurs généraux, qui diffèrent selon leur application pratique spécifique ».

L’expérience socialiste du XXe siècle a donc échoué dans son centre soviétique ; mais c’est un échec temporaire dû à ce dogmatisme et à ses causes sociales de classe. Cet échec ne signifie nullement le succès final du modèle économique, social et politique capitaliste imposé et parrainé par la « main invisible du marché »

Le capitalisme étant incapable de résoudre les problèmes majeurs de l'humanité. Son incapacité est dûe au fait que son système a remis la destinée humaine entre les mains d’une poignée de particuliers au nom de la privatisation et au nom de ce qu'on a appelé faussement les ajustements structurels (les destructions en réalité), éliminant ainsi tout ce qui était public et ouvrant les portes à l’accumulation d’une richesse faramineuse devant un petit groupe de personnes , groupe qui après la croissance et l'expansion des politiques monopolistiques, en particulier dans le domaine monétaire , s’est érigé en «

oligarchie financière mondiale » ...

Ce groupe de personnes a découvert ce qu'on appelle les sociétés multinationales ou sociétés transnationales et transfrontalières, et a délibérément divisé géographiquement le processus de la production des produits manufacturés à la recherche de la main- d'œuvre la moins chère dans tel ou tel endroit du monde, et a œuvré à habituer les peuples et les individus aux prêts, subventions et « bienfaisances ! » résultant du surplus de ses pillages , écartant ainsi les humains loin de la philosophie de l'autonomie et de l’auto - suffisance en les soumettant tous au pouvoir de l'argent et de l’endettement .

En outre, l'épanouissement de l’imaginaire de cette classe l’a poussée vers le recours à la puissance robotique au lieu de la force musculaire des travailleurs, en s'appuyant donc sur l’ingénierie des personnes hautement qualifiées, compétentes et spécialisées , ainsi que sur l'intelligence artificielle, ce qui lui a permis de se débarrasser du coût de la force de travail, et même de toute énergie intelligente et de toute méthode de production en particulier dans le monde agricole qui ne sert pas ses intérêts monopolistiques.

Dans ce contexte, elle a arbitrairement licencié tous ceux qu'elle considère impudemment comme des « surplus humains »

Le concept du « surplus humain » dépasse naturellement le concept de ce qu'on appelait avant l'armée de réserve des chômeurs.

La classe ouvrière, s’était formée et s'était organisée dans des usines et des différents établissements de la production, ce qui lui a permis d’encadrer et de maîtriser ses mouvements syndicaux puis partisans, et ce qui a fait de son rôle une nécessité historique indispensable pour éliminer le système individualiste; mais cette classe ouvrière n'est plus aujourd'hui seule sur le terrain car il y a à côté de ses anciens alliés du monde paysan, de nouvelles foules de victimes superflues, que ne sont pas encadrées naturellement dans les syndicats et les partis progressistes traditionnels , car ces cadres traditionnels étaient un produit de la révolution industrielle, alors que ces nouvelles foules sont un produit de la croissance grandissante la révolution technologique, et de ses nouvelles données, et il n'y a pas d’usines ou de établissements de production pour contenir et organiser leurs

mouvements ;

On peut donc dire que le rôle historique de la classe ouvrière a quelque peu diminué, mais sans nullement disparaître

Cela impose aux détenteurs de la pensée socialiste, qui ont traditionnellement défendu les classes populaires, le devoir de réfléchir à la manière de s'adresser également à ces nouvelles masses et de bénéficier des énergies qu'elles contiennent car elles aussi en cherchant à renverser ce qui existe bénéficient d’un surplus d'intelligence formé par les diplômés qui ont été éliminés par l'organisation sociale capitaliste et placés même contre leur gré dans les rangs de la protestation.

Ce sont ces foules dont nous avons vu les membres bouger, par exemple, lors des manifestations des « gilets jaunes » à Paris l'un des centres avancés du capital, mais qui se déplaçaient, comme tout le monde l’a remarqué, sans une boussole correcte et sans leadership, en profitant seulement pour le réseautage et l’organisation de leurs mouvements de ce que les moyens de la communication moderne ont mis à leur disposition, ces moyens qui sont le résultat de la révolution technologique dont ils sont les victimes (et ce réseautage-là est une nouvelle donnée organisationnelle qu'il faut étudier et saisir).

Ces nouvelles alliances sociales doivent se réaliser dans tous les pays selon les exigences de leurs situations réalistes, car il n'y a de succès pour aucun projet ou mouvement sans son enracinement local spécifique.

Mais, à mesure que ces alliances s'implantent localement, elles doivent aussi appeler à la mise en place d'une coordination internationaliste devenue de plus en plus possible avec le développement moderne des moyens de communication. Cette coordination internationaliste serait de nature à synchroniser les luttes de tous les opprimés que ce soit les classes laborieuses et démunies ou les peuples et les nationalités et nations soumises par la force criminelle au joug du capital.

C’est ainsi qu’aujourd’hui, cette coordination est devenue plus que nécessaire voire indispensable, parce que le capitalisme, avec sa découverte des sociétés transnationales, a créé dans les faits une voie mondiale à laquelle on ne peut résister qu’avec la coopération internationaliste

Le centre impérialiste représenté par l’oligarchie financière mondialiste serait ainsi encerclé par des révolutions démocratiques nationales coopérant entre elles et défendant sur leurs terres leurs droits à leurs biens et à leurs richesses, ainsi que leurs caractéristiques historiques, linguistiques et culturelles, et leurs entités politiques existantes face à la mondialisation qui œuvre ouvertement à anéantir ou à affaiblir pour le moins, l’État – nation et l’État en général ;

Cette synchronisation est à notre époque le moyen le plus simple, et le plus sûr pour éliminer l’hégémonie mondialiste et de progresser vers l’horizon socialiste et internationaliste dans des conditions avancées de richesse et de culture.

Les mouvements qui aspirent, tant sur le plan théorique que pratique, à changer sérieusement et radicalement les conditions existantes sur lesquelles le monde a été construit depuis l'instauration du système individualiste, ne peuvent pas atteindre leurs objectifs et changer l'orientation de la vie humaine sauf en restituant la dimension sociale de la vie humaine, en l'imposant philosophiquement de manière irréversible, en la reconnaissant , en l'incluant dans les constitutions et les législations, et en veillant à son enracinement dans les pratiques quotidiennes de tous les membres du genre humain, notamment à travers les programmes et les contenus pédagogiques qui encadrent et forment les générations émergentes.

Cela ne doit jamais mener à ignorer la dimension individuelle de l'être humain (qui est bien sûr différente de la dimension individualiste égoïste et pathologique), ou à méconnaitre le droit de l'individu à l’ingéniosité et à la créativité, mais seulement à renforcer la dimension communautaire et à rendre la dimension individuelle en harmonie avec elle et pleinement intégrée en elle.

Cela nécessite un processus de création intellectuelle, philosophique, culturelle et organisationnelle qui s'enracine dans tous les efforts antérieurs depuis les révolutions et les rébellions des esclaves, des paysans pauvres et des intellectuels libres en quête d'égalité et de liberté.

Ce processus qui doit également s'inspirer de " l'élan de valeurs " contenu dans les systèmes spirituels avant que celles-ci ne soient complètement domestiquées par les classes dominantes a aussi le devoir- mais dans le but de la négation et du dépassement des mythes et de ce qui est en place - de comprendre tous les mécanismes accélérés que l’organisation libérale ne cesse d'imposer par le moyen de ses transformations et ses adaptations à toutes les circonstances soit celles qu'elle contribue à créer directement dans le champ de son action, soit celles qu'elle crée dans le champ de sa réaction lorsqu'elle se confronte à ceux qui refusent ses projets criminels.

Le modèle individualiste pathologique actuellement dominant a humilié la dimension humaine de l'être humain , et n’a été qu'un héritier par excellence des époques de la sauvagerie humaine,

C’est pour cela qu’il ne peut objectivement continuer à être , mais les efforts visant à le renverser et à le dépasser ne peuvent pas non plus parvenir à leurs buts sauf si deux conditions subjectives concomitantes soient remplies :

La première consiste dans la capacité des forces révolutionnaires à lire scientifiquement

et correctement le réel.

À ce stade, il devient de notre devoir de reconnaître clairement, franchement et sans aucune ambiguïté, que c'est exactement cela qui manque aux mouvements alternatifs de nos jours. Ce qui fait que ces mouvements pataugent dans des crises étouffantes presque partout sur la planète, Tout cela exige de toute urgence la réalisation d’une puissante révolution culturelle et morale basée sur les valeurs et la richesse du patrimoine moral de l’humanité tel que forgé et tracé à travers un long chemin avec les sacrifices, le sang, et les souffrances par les héros de la liberté et de la justice et par tous ceux qui ont aspiré à la VERITE à travers l’espace et le temps.

Cela nécessite, et dans le but de faire surgir L’HOMME NOUVEAU, de brider l’égo malade chez les individus, par tous les moyens dont l’affinement et l’orientation des principes éducatifs et législatifs vers la glorification des valeurs de l'amour, de la fraternité, de l’entraide et de coopération solidaire soit entre l'individu et ses semblables, ou entre les différents peuples et nations, et de bâtir la vie humaine sur cette base supérieure La deuxième est la possibilité de trouver des formes d’encadrement, d'organisation et d'interaction qui s'inspirent inévitablement des acquis organisationnels précédents dans la résistance aux injustices et aux hégémonies de classe et en particulier dans ses formes modernes nécessités par la lutte contre la bourgeoisie capitaliste, mais en donnant à ces acquis plus d’efficacité, d’efficience, et de pérennité à travers le réseautage dans une approche participative et ce par l'exploitation du développement des méthodes de communication modernes. Ceci exige des socialistes qui sont les porteurs du projet du grand changement et la force la plus ferme œuvrant à sa réalisation d’être les soldats :

- de la lutte pour la démocratie complète du peuple,

- de la libération du monde agricole de l’aliénation qui lui est imposée,

- de l’éradication de l'exploitation, de la marginalisation et de la privation,

- de la réalisation des ambitions patriotiques et nationales des peuples opprimés par

l’impérialisme, car l'internationalisme est ici nationaliste et patriotique dans certaines de ses manifestations ou il ne peut jamais être,

- de la résistance à toute domination, quelle que soit sa forme, économique, linguistique ou culturelle et surtout celles exercées contre les minorités.

- de la préservation de la nature contre son lent assassinat criminel par les gangs du Capital,

- du maintien de la paix ce qui implique la résistance face aux guerres agressives et destructrices alimentées par les lobbies impérialistes en quête de faire fonctionner les usines qui fabriquent les armes et les usines de la soi-disant reconstruction,

- et de la défense de l'égalité entière et effective entre les femmes et les hommes, car c’est là où se trouve la mission qu’en l’absence de sa réalisation nulle autre émancipation n’est possible.

Les chaînons de ces batailles relativement dispersées dans leur situation actuelle doivent tous être inclus dans le creuset de la bataille globale : la bataille de la libération de l'homme de tous les facteurs de son aliénation et de sa dégradation, et cette bataille est nécessairement la bataille fondamentale du socialisme.